J ai longtemps hésité avant d’écrire mon histoire. C’était il y a longtemps, 20 ans pour être exacte et c’est comme si c’était hier.
C’était très compliqué pour nous d’avoir des enfants et ça devenait un rêve intouchable.
Après 6 FIV et 3 fausses couches, mon rêve devient presque réalité. Le test est positif !
Une joie tellement forte.
Je vais devenir maman. Tout est presque prêt pour l’accueillir, mon rêve devient réalité: je l’imagine, mon mari est tellement content et on prépare sa chambre. On n’y croyait plus.
Au 5ème mois vient l’écho morphologique. Tellement hâte! Je vois la tête du gynécologue fermée et là, je me dis: “c’est pas possible, pas après tout ce que j’ai subi”.
Et pourtant, annonce inimaginable: mon bébé a une maladie. Ses organes vitaux ne se développent pas et absence de liquide amniotique. Aucune chance de survie. Mon cœur s’est arrêté à ce moment-là.
Le monde s’effondre. On sort de la consultation tout seuls, tous les deux sans se parler, dans le silence. Pourquoi nous ?
J’ai fait une IMG quelques jours avant d’entrer dans le 6ème mois. Aucun cri, un silence qui n’est pas normal. Mes larmes coulent et je n’ose pas demander si c’est une fille ou un garçon mais sur un élan de courage, je demande, et elle me répondavec une petite voix : “c’était une petite fille”, et elle repart avec elle je ne sais pas où.
Au départ, on avait dit qu’on ne voulait pas voir le bébé tellement la douleur était forte mais mon cœur en a décidé autrement. Je demande à la voir. Et ce choix, je le conseille à tous pour pouvoir faire son deuil.
Mais mon regret est de ne pas l’avoir reprise et de ne pas lui avoir offert un départ de considération comme chaque défunt. Mais il faut remonter à 20 ans et à l’époque, il n’y avait aucun soutien ni conseils adéquats.
Aujourd’hui j’ai deux autres enfants mais les grossesses se sont passées dans la peur et le doute à chaque échographie. J’y pense chaque jour depuis cette date et chaque 13 juin encore plus fort.
Mes enfants sont ma force.
J’ai voulu faire comme si de rien n’était pour me protéger, mais me protéger de quoi ? D’avoir perdu mon premier enfant ? C’est impossible. Il faut pouvoir en parler et se donner le temps de pleurer. Mais je n’ai pas pu, il fallait passer à autre chose.
On vit tous les jours avec ce regret. Heureusement, les temps ont changé. J’ai longtemps pensé qu’il faut mettre en place des espaces de parole, de partage pour pouvoir conseiller et aider les parents qui vivent ce moment tragique.
J’ai comme souvenir une simple photo instantanée que les infirmières avaient faite pour mettre dans le dossier.
J’ai demandée à l’avoir et elle me l’ont donnée mais j’ai peur qu’elle s’abime et qu’un jour, je ne la vois plus. Je la protège tellement. Je m’excuse à chaque fois de l’avoir laissée et si je pouvais revenir en arrière je n’aurais pas agi comme ça.
Quand je regarde mes enfants, je me dis à qui elle aurait ressemblé ? Et puis, je me dis que rien n’arrive par hasard ! Heureusement qu’il existe des associations comme la vôtre pour soutenir les parents.
Et les photos sont tellement importantes.
