Il y a quelques mois, je venais écrire ici l’histoire de notre petit miracle, Lou, née sans vie le 14 mars 2024 à 35SA.
Nous avions dû renoncer à son amour car elle était porteuse d’une malformation cérébrale complexe (découverte à l’échographie du 3ème trimestre).
Nous ne voulions pas, pour elle, d’une vie qui n’en serait pas une et nous avions dû faire le choix impossible et terrible de l’IMG.
Ni son papa, ni moi ne sommes porteur d’une quelconque anomalie génétique et c’est une mutation apparue de novo qui nous a privés de notre petite fille : accident génétique. Il y avait moins de 1 risque sur 1 million pour que ça arrive et ça nous est arrivé. Un hasard si injuste et si cruel dont on avait déjà tellement de mal à se relever.
Et aujourd’hui c’est abattue et meurtrie que je viens raconter l’histoire de son petit frère, Axel, notre petit garçon.
Mais comment parler de l’horreur et de l’innommable à nouveau ?
Je ne sais plus quoi dire ni quoi écrire.
L’amour et l’espoir.
La douleur et le chaos.
L’injustice et la colère.
Nous ne nous attendions pas à accueillir un nouvel enfant, tu n’étais pas prévu et pourtant notre trésor tu étais bien là.
Juillet, nous apprenons qu’un petit bébé allait venir agrandir notre famille d’ici quelques mois. Moi, qui pensais ne jamais pouvoir porter d’enfant, j’étais de nouveau enceinte.
Nous avons pris ta présence comme un signe du destin ; la vie, après nous avoir pris notre fille, nous envoie ce bébé. Les angoisses et la peur sont là, difficiles à refouler. On a si peur…si peur de t’aimer. Parce que l’amour c’est risqué. Risquer de te perdre et de ne pas y survivre, cette fois.
Et puis voir ton petit cœur battre la toute première fois a balayé nos doutes et nos incertitudes. T’aimer n’était pas une option, mais finalement une évidence. Comment aurait-il été possible de ne pas t’aimer ?
L’AMOUR FOU à nouveau. L’amour déjà si fort. Et l’espoir qui renaît.
Mais la nature est joueuse, moqueuse, cruelle, elle vous laisse toucher du doigt votre rêve, puis vous le retire.
L’horreur a de nouveau frappé. Début septembre, contrôle écho morphologique des 3 mois, on est si contents de te voir puis… on tombe. De tellement haut. L’échographie révèle des points d’inquiétude et une très grosse suspicion de trisomie (clarté nucale bien trop épaisse, des mains qui ne s’ouvrent pas, les doigts qui se chevauchent et une malformation sur un des pieds…). On ne comprend pas. Pourquoi ? On nous a dit tellement de fois que la foudre ne tombe jamais deux fois au même endroit.
Rien à voir avec ce dont souffrait ta sœur, alors c’est impossible…Ça ne peut être qu’une erreur. Pas nous. Pas encore.
On doit donc faire une biopsie de trophoblastes (prélèvement du placenta) dès que possible pour faire des tests génétiques. Mais mon placenta n’est jamais correctement placé. Les semaines passent et le temps s’écoule.
Malgré les interrogations sur la pathologie dont souffre notre bébé, on nous laisse partir pour 15 jours de vacances. On comprend aujourd’hui que les médecins ont voulu nous offrir un peu de répit, eux voyaient venir ce à quoi nous allions devoir faire face à nouveau.
Avec toi on découvre la Corse, c’est si beau. Tu es là. Je commence à sentir tes premiers mouvements, si doux. Puis vient le tour de ton papa. Chacun de tes coups est une immense vague d’amour et de bonheur.
On tient, on espère, malgré la douleur et la fatigue. Et on fait ce qu’on sait faire de mieux : on s’aime. Plus fort que tout. On ne sait que trop bien que l’amour ne suffit pas toujours, mais on te donne tout ce qu’on peut, de toutes nos forces, pour que tu saches combien tu es aimé, pour renforcer ce lien si fort entre nous.
L’amniocentèse a lieu un mardi début octobre, on apprend le dimanche que tu souffres de trisomie 18.
Aucun lien avec la maladie de notre Loulou, “la faute à pas de chance” nous disent les médecins… peut-on croire à un truc pareil ??? Peut-on accepter un truc pareil ???
Et puis on nous explique ce qu’est la trisomie 18. Bien moins connue que la 21, pour une raison simple. Les bébés qui en sont atteints, ne survivent pas dans la majorité des cas.
Ils meurent le plus souvent dans le ventre de la maman, lors de la naissance ou peu de temps après la naissance.
Dans de très, très rares cas, ils survivent de quelques mois à 1 an, mais une vie qui n’en est pas vraiment une.
Je commence mon 5ème mois de grossesse, mais notre bébé va mourir.
Nos cœurs sont prêts à t’aimer, à t’offrir tout ce qu’on a, mais pas prêts à ne jamais voir la couleur de tes yeux. Pas prêts à faire face à cette douleur abyssale qui nous a déjà tellement brisés.
Et nous voilà, de nouveau face à ce choix impossible, cruel et odieux.
Choisir de te laisser vivre ou non, avec les éléments médicaux que nous possédons. Choisir de poursuivre la grossesse quelque temps ou de l’interrompre immédiatement. Choisir de continuer à créer du lien avec toi ou non. Choisir de, peut-être, te laisser naître en vie ou d’arrêter ton cœur avant ta naissance.
Comme pour Lou, nous n’avons finalement pas d’autre choix que l’IMG pour te préserver d’une vie de souffrance. Une partie de moi le sait, mais l’autre partie n’arrive pas à se résoudre à t’ôter la vie.
Qui sommes-nous pour prendre une telle décision ? N’est-ce pas à la vie de décider ? Quel est le sens de votre venue sur cette Terre si nos enfants ne peuvent même pas prendre leur premier souffle ?
Et puis finalement, la vie a choisi pour nous.
Le soir du 6 novembre, la poche des eaux s’est rompue, les contractions sont d’emblée très fortes. Quand on arrive aux urgences, ton cœur bat toujours, le temps pour nous de te dire combien on t’aime, combien on est fiers d’être tes parents. Tu es si fort, on sait que tu t’es déjà tellement battu, notre petit super héros, tu as le droit t’en aller.
C’est la quantité anormalement élevée de liquide amniotique due à ta pathologie qui te fait naître prématurément.
Notre petit garçon.
Dans la nuit noire, le 7 novembre 2024, tu es né sans vie, laissant un vide immense où on espérait tant de joie.
On a perdu notre bébé, notre fils. Notre deuxième enfant. La chair de notre chair.
J’ai accouché une nouvelle fois, comme n’importe quelle maman. Mais pour la seconde fois, le silence. Pas de larmes de joie. Des pleurs, mais ce ne sont pas les tiens.
Tu es tout petit, si petit, mais tellement beau. Un élan d’amour nous a envahi dès que nous t’avons vu. Et depuis cette nuit, ta présence, comme celle de ta sœur, nous manque comme un écho douloureux qui ne cesse de résonner.
Notre Axel,
Tu étais l’enfant d’après. L’éclaircie dans l’orage. Celui qui arrivait après le tsunami. Celui qui m’a permis de croire que j’allais réussir à continuer de vivre. Tu n’étais pas l’enfant qui comble un vide, tu n’étais pas l’enfant qui remplace, oh non. Tu étais bien toi.
Tu étais l’enfant que l’on appelle “arc-en-ciel” ; moi je n’aime pas ce terme. Parce que même après la pluie, ce n’est pas toujours tout plein de jolies couleurs. Mais pourquoi a-t-il fallu que ce soit si noir ?
Où que tu sois Axel, on sait que tu ne seras jamais seul et que ta grande sœur veille sur toi.
Nous pensons à vous avec tendresse, comme n’importe quel parent. On s’inquiète pour vous, nous aussi, on se demande si vous êtes heureux là où vous êtes. Et on ne trouve un peu de paix que de vous savoir ensemble, tous les deux.
Est-ce que je trouverai la force de me battre, de continuer ? Est-ce que j’aurai le courage de rester debout pour faire briller l’amour que j’ai pour vous, pour vous honorer comme vous le méritez ? Je n’en suis plus vraiment sûre.
Ce dont je suis certaine en revanche c’est que l’amour lui, dure toujours, un amour qui dépasse l’absence.
À Axel,
À Lou,
À nos bébés des étoiles
Soyez les étoiles qui font ce qui leur plaît. Les étoiles les plus pétillantes de la voie lactée. Les plus pures, les plus combatives, les plus intrépides.
Soyez les étoiles qui font rire toute la galaxie.
On vous aime si fort. On vous aime plus que trois fois mille